Au 1 octobre 2017, le compte personnel de prévention de la pénibilité a cédé sa place au compte professionnel de prévention. Si ce compte a toujours pour objectif de compenser les conditions de travail difficiles des salariés exposés à certains facteurs de risques professionnels, il est toutefois allégé avec la suppression de 4 facteurs sur les 10 jusqu’alors pris en compte. Voici un tour de ce dispositif en 6 questions.
Le principe du compte professionnel de prévention est de faire bénéficier les salariés d’avantages visant à compenser le caractère éprouvant de leur travail. Concrètement, les travailleurs exposés à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels cumulent des points qu’ils peuvent échanger contre le financement d’une formation, un passage à temps partiel sans perte de salaire ou un départ anticipé en retraite.
Le compte professionnel de prévention est géré par la Caisse nationale de l’Assurance maladie des travailleurs salariés et ses caisses locales, les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (ou la Mutualité sociale agricole pour les salariés agricoles). Ce sont ces organismes qui, à partir des informations transmises chaque année par les employeurs, décident de l’ouverture du compte au profit d’un salarié et gèrent le cumul et l’échange de points. Ils sont également chargés de réaliser des contrôles auprès des employeurs et d’administrer les réclamations.
Les facteurs de risques pris en compte dans le cadre du compte professionnel de prévention sont au nombre de 6. Ils sont liés :
À noter : jusqu’au 30 septembre 2017, étaient inclus dans le compte personnel de prévention de la pénibilité les manutentions manuelles de charges, les postures pénibles, les vibrations mécaniques et les agents chimiques dangereux. 4 facteurs de risques qui sont sortis du compte professionnel de prévention depuis le 1
Une exposition au-delà de certains seuils
Pour être prise en compte et donner droit à des points, la simple exposition du salarié à un ou plusieurs facteurs de risques ne suffit pas. Il faut, en effet, qu’il ait été exposé à ces facteurs au-delà de certains seuils déterminés par décret. Étant précisé que ces seuils sont appréciés après application des mesures de protection collective et individuelle mises en place (système de ventilation, bouchons d’oreille…).
SEUILS D’EXPOSITION DES FACTEURS DE RISQUES DEPUIS LE 1 |
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Facteur de risques | Seuil | ||
Action ou situation | Intensité minimale | Durée minimale | |
Activités exercées en milieu hyperbare | Interventions ou travaux | 1 200 hectopascals | 60 interventions ou travaux par an |
Températures extrêmes | Température inférieure ou égale à 5°C ou au moins égale à 30°C | 900 heures par an | |
Bruit | Niveau d’exposition au bruit rapporté à une période de référence de 8 heures d’au moins 81 décibels (A) | 600 heures par an | |
Exposition à un niveau de pression acoustique de crête au moins égal à 135 décibels (C) | 120 fois par an | ||
Travail de nuit | Une heure de travail entre minuit et 5 heures du matin | 120 nuits par an | |
Travail en équipes successives alternantes | Travail en équipes successives alternantes impliquant au minimum une heure de travail entre minuit et 5 heures du matin | 50 nuits par an | |
Travail répétitif caractérisé par la réalisation de travaux impliquant l’exécution de mouvements répétés, sollicitant tout ou partie du membre supérieur, à une fréquence élevée et sous cadence contrainte | Temps de cycle inférieur ou égal à 30 secondes : 15 actions techniques ou plus | 900 heures par an | |
Temps de cycle supérieur à 30 secondes, temps de cycle variable ou absence de temps de cycle : 30 actions techniques ou plus par minute |
Évaluer l’exposition
Tous les ans, l’employeur doit évaluer si ses salariés sont exposés, au-delà des seuils, à un ou plusieurs des 6 facteurs de risques inclus dans le compte professionnel de prévention. Une évaluation faite au regard des conditions habituelles de travail caractérisant le poste occupé par le salarié, appréciées en moyenne sur l’année.
Pour simplifier cette tâche qui peut être ardue pour certains facteurs, l’employeur peut se reporter aux postes, métiers ou situations de travail définis par un accord de branche étendu ou dans des référentiels professionnels de branche homologués par arrêté. Début mars 2018, 13 branches avaient adopté de tels référentiels : les entreprises du paysage, les entreprises de l’eau, la Fédération des Services Energie Environnement, la Chambre syndicale de la désinfection, désinsectisation et dératisation, les employeurs de la branche de l’aide à domicile, les entreprises de la beauté, l’Union Sport & cycle (équipements sportifs), les entreprises de coiffure, les poissonniers-écaillers, le commerce de gros et international, pour les métiers de la logistique, la Fédération du négoce de bois et des matériaux de construction et la branche du commerce, l’Observatoire des métiers et des qualifications dans la distribution, location, maintenance des matériels agricoles, de travaux publics, de manutention et de parcs et jardins et l’Union professionnelle des entreprises de commerce à distance.
Ces référentiels sont disponibles sur le site du ministère du Travail, rubrique Santé au travail, puis Prévention des risques, puis Prévention de la pénibilité.
Déclarer l’exposition
Pour chaque salarié concerné, l’employeur doit déclarer le ou les facteurs de risques auxquels il a été exposé au-delà des seuils prévus au titre de l’année écoulée.
En pratique : cette déclaration est effectuée via la déclaration sociale nominative (DSN).
Pour les salariés dont le contrat de travail est toujours en cours au 31 décembre, la déclaration de ces facteurs de risques est effectuée dans la DSN liée à la paie de décembre, c’est-à-dire dans la DSN transmise au plus tard le 5 ou le 15 janvier (selon l’effectif de l’entreprise). Par exemple, la déclaration des facteurs de risques de l’année 2018 interviendra dans la DSN envoyée le 5 ou 15 janvier 2019.
Pour les salariés qui quittent l’entreprise en cours d’année, l’employeur doit effectuer la déclaration des facteurs de risques dans la DSN correspondant à la dernière paie du salarié, soit le 5 ou le 15 du mois qui suit la fin du contrat de travail.
Un salarié employé pendant toute l’année civile cumule :
Le salarié qui ne travaille pas toute l’année bénéficie, quant à lui, par période de 3 mois d’exposition :
À savoir : pour les salariés nés avant le 1
Un salarié ne peut pas acquérir plus de 100 points pendant toute sa carrière professionnelle. Sachant qu’il ne perd pas les points acquis, mais non utilisés lorsqu’il change d’employeur ou est au chômage.
Chaque salarié peut échanger les points inscrits sur son compte contre le financement :
Barème d’échange des points* | ||
Points | Bénéfice | |
Formation professionnelle | 1 | 25 heures de formation créditées sur le compte personnel de formation |
Passage à un travail à temps partiel | 10 | 3 mois de travail à mi-temps avec maintien de la rémunération |
Majoration des trimestres d’assurance vieillesse | 10 | Un trimestre |
* Les 20 premiers points cumulés sont réservés à la formation professionnelle, sauf pour les salariés nés avant le 1 |
Les employeurs d’au moins 50 salariés ou appartenant à un groupe d’au moins 50 salariés doivent négocier un accord en faveur de la prévention des effets de l’exposition aux facteurs de risques professionnels si au moins 25 % de leurs salariés sont déclarés exposés au titre du compte professionnel de prévention. Sachant qu’en cas d’échec de ces négociations, les entreprises doivent mettre en place, après avis des représentants du personnel, un plan d’action sur ce thème.
Précision : les entreprises de moins de 300 salariés ou appartenant à un groupe de moins de 300 salariés n’ont pas à conclure un accord ou à instaurer un plan d’action si elles sont couvertes par un accord de branche étendu portant sur la prévention des effets de l’exposition aux facteurs de risques professionnels.
L’accord ou le plan d’action, conclu pour une durée maximale de 3 ans, traite d’au moins 2 des thèmes suivants :
Il doit également aborder au moins deux des sujets suivants :
À savoir : les facteurs de risques concernés par cet accord ou le plan d’action sont les 6 pris en compte dans le cadre du compte professionnel de prévention (activités en milieu hyperbare, températures extrêmes, bruit, travail de nuit, travail en équipes successives alternantes et travail répétitif) auxquels s’ajoutent les manutentions manuelles de charges, les postures pénibles définies comme positions forcées des articulations, les vibrations mécaniques et les agents chimiques dangereux.
Les entreprises qui ne respectent pas l’obligation d’être couvertes par un accord ou un plan d’action risquent une pénalité dont le montant maximal correspond à 1 % des rémunérations versées aux travailleurs concernés par cette obligation pendant les périodes au cours desquelles l’entreprise n’était pas couverte.
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