Déclaration de confidentialité des comptes annuels : pas n’importe quand !

La déclaration de confidentialité des comptes annuels doit être effectuée au moment du dépôt de ces comptes au greffe. Selon la Cour d’appel de Paris, une demande tendant à rendre confidentiels des comptes de résultat qui ont été déposés précédemment ne peut pas être satisfaite.

On sait que les micro-entreprises peuvent demander que leurs comptes annuels ne soient pas publiés. De leur côté, les petites entreprises peuvent demander que leur compte de résultat ne soit pas rendu public.


Rappel : les micro-entreprises sont celles qui ne dépassent pas deux des trois seuils suivants : 350 000 € de total de bilan, 700 000 € de chiffre d’affaires net et 10 salariés. Quant aux petites entreprises, il s’agit de celles qui ne dépassent pas deux des trois seuils suivants : 6 M€ de total de bilan, 12 M€ de chiffre d’affaires net et 50 salariés.

Pour ce faire, elles doivent souscrire une déclaration de confidentialité au moment du dépôt de leurs comptes annuels au greffe du tribunal de commerce. Et attention, la Cour d’appel de Paris vient de juger que cette déclaration doit être concomitante au dépôt des comptes et qu’elle ne peut donc pas être effectuée postérieurement.

Dans cette affaire, une société par actions simplifiée (SAS) avait demandé, en 2022, que ses comptes de résultat des exercices 2017, 2020 et 2021 soient rendus confidentiels. Le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés avait rejeté sa demande, en faisant valoir que la déclaration de confidentialité devait être effectuée concomitamment au dépôt des comptes. La SAS avait alors fait appel de cette décision, soutenant que la loi ne prévoit aucune limite à la possibilité de rendre les comptes confidentiels postérieurement à leur dépôt et à leur publication.

Mais la Cour d’appel de Paris n’a pas été sensible à cet argument. Ainsi, elle a rappelé que l’article du Code de commerce (L. 232-25) applicable en la matière prévoit expressément que la déclaration de confidentialité des comptes annuels doit s’effectuer « lors » du dépôt de ces comptes au greffe. Et qu’aucune disposition législative ou réglementaire ne permet de différer dans le temps la déclaration de confidentialité. Pour elle, cette déclaration ne pouvait donc pas être effectuée postérieurement au dépôt du compte de résultat.


Cour d’appel de Paris, 6 juin 2023, n° 23/00062


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Bail rural : gare à la dissolution d’une société colocataire sans en informer le bailleur !

La dissolution d’une société cotitulaire d’un bail rural sans avoir été notifiée au bailleur constitue un motif de résiliation de ce bail.

Lorsque deux personnes (des époux, par exemple) sont cotitulaires d’un bail rural et que l’une d’elles cesse de participer à l’exploitation des terres louées (par exemple après son départ à la retraite), celle qui continue à exploiter dispose d’un délai de 3 mois pour demander au bailleur, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, la poursuite du bail à son seul nom. Ce dernier ne peut alors s’y opposer qu’en saisissant le tribunal paritaire des baux ruraux dans les 2 mois qui suivent. Mais attention, si cette formalité n’est pas accomplie, le bailleur est en droit d’obtenir du juge qu’il prononce la résiliation du bail, et ce sans avoir à démontrer que le départ de l’autre colocataire lui a causé un préjudice.

De la même manière, la résiliation du bail est encourue lorsque l’un des colocataires est une société et que la dissolution de celle-ci n’a pas été portée à la connaissance du bailleur dans le délai de 3 mois par le colocataire resté en place. En effet, selon les juges, la dissolution d’une société colocataire doit être considérée comme la cessation de sa participation à l’exploitation des terres louées, cette dissolution devant donc être notifiée au bailleur, à l’instar du départ d’un colocataire personne physique.


Illustration : dans cette affaire, une personne physique et une société, en l’occurrence un Gaec, étaient cotitulaires d’un bail rural. En cours de bail, le Gaec avait été dissout sans que le bailleur en ait été avisé dans les 3 mois par le locataire resté en place. Les juges ont donc considéré que la dissolution du Gaec aurait dû être notifiée au bailleur et qu’à défaut, ce dernier pouvait donc obtenir de plein droit la résiliation du bail pour ce motif.


Cassation civile 3e, 7 décembre 2022, n° 21-19789


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Vente de fruits et légumes frais : fini les emballages plastiques !

À compter du 1 juillet 2023, les commerces de détail qui vendent des fruits et légumes frais non transformés seront tenus de les présenter sans conditionnement en plastique. Des dérogations sont toutefois prévues.

Initialement, il était prévu qu’à compter du 1er janvier 2022, les commerces de détail proposant à la vente des fruits et des légumes frais non transformés ne pourraient plus les exposer sous emballage composé pour tout ou partie de matière plastique. Mais cette mesure, introduite par la loi du 10 février 2020 sur le gaspillage, n’avait pas pu entrer en vigueur car son décret d’application avait été annulé par le Conseil d’État.

Du coup, un nouveau décret, qui entrera en vigueur ce 1er juillet, vient d’être publié. Il précise les modalités d’application de cette nouvelle obligation et indique, en particulier, la liste des fruits et légumes qui ne sont pas soumis à l’interdiction.

Ainsi, à compter du 1er juillet 2023, les fruits et légumes frais « non transformés », c’est-à-dire ceux qui sont vendus à l’état brut, ou qui ont subi une simple préparation telle que le nettoyage, le parage, l’égouttage ou le séchage, ne pourront plus être présentés à la vente sous emballage plastique.


À noter : pour permettre l’écoulement des stocks d’emballages, les fruits et légumes concernés pourront continuer d’être vendus sous emballage plastique jusqu’au 31 décembre 2023.

Quant aux conditionnements en plastique visés par l’interdiction, il s’agit des récipients, des enveloppes externes et des dispositifs d’attache recouvrant entièrement ou partiellement les fruits et légumes afin de constituer une unité de vente pour le consommateur.


Précision : les élastiques nécessaires au regroupement de plusieurs petits fruits ou légumes, tels que ceux qui sont présentés à la vente avec des fanes (radis, carottes, etc.) ou les herbes aromatiques, restent autorisés.

Les fruits et légumes exemptés

Les fruits et légumes qui présentent un risque de détérioration lors de leur vente en vrac échappent à l’interdiction, et ce sans limite de temps (contrairement à ce que prévoyait le décret annulé). Ainsi, pourront continuer d’être vendus sous emballage plastique :– les endives, les asperges, les brocolis, les champignons, les pommes de terre primeur, les carottes primeur et les petites carottes ;– la salade, la mâche, les jeunes pousses, les herbes aromatiques, les épinards, l’oseille, les fleurs comestibles, les pousses de haricot mungo ;– les cerises, les canneberges, les airelles et les physalis ;– les fruits mûrs à point, c’est-à-dire les fruits vendus au consommateur final à pleine maturité, et dont l’emballage présenté à la vente indique une telle mention ;– les graines germées ;– les framboises, les fraises, les myrtilles, les mûres, les groseilles, la surelle, la surette et la groseille pays, les cassis et les kiwaïs.


Décret n° 2023-478 du 20 juin 2023, JO du 21


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Zoom sur le contrat d’engagement républicain

Retour sur le contrat d’engagement républicain instauré, en janvier 2022, par la loi confortant le respect des principes de la République.

Depuis plus d’un an, les associations doivent, dans le cadre de certaines démarches, s’engager à respecter les sept engagements du contrat d’engagement républicain (CER).

Qui est concerné ?

La souscription du CER s’impose aux associations qui sollicitent une subvention auprès, notamment, de l’État, d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public administratif, qui demandent un agrément de l’État (sport, protection de l’environnement, jeunesse et éducation populaire…) ou qui souhaitent être agréées par l’Agence du service civique.

L’association qui signe un CER doit en informer ses membres, ses bénévoles, ses salariés et ses dirigeants par tout moyen (affichage, courriel, courrier…).


En pratique : le CER est souscrit en cochant la case dédiée dans le formulaire de demande de subvention ou d’agrément ou en complétant l’attestation sur l’honneur préremplie de ce formulaire.

Quels engagements ?

Le CER comporte sept engagements :– le respect des lois de la République ;– la liberté de conscience ;– la liberté des membres de l’association ;– l’égalité et la non-discrimination ;– la fraternité et la prévention de la violence ;– le respect de la dignité de la personne humaine ;– le respect des symboles de la République (drapeau tricolore, hymne national et devise de la République).

Quelles sanctions ?

L’association est responsable des manquements au CER commis par ses dirigeants, ses salariés, ses membres et ses bénévoles en cette qualité ainsi que de leurs manquements qui sont directement reliés à l’activité associative. Cette responsabilité n’est cependant engagée que si les dirigeants de l’association, bien qu’informés de ces agissements, se sont abstenus de prendre les mesures nécessaires pour les faire cesser (courriers, plaintes, sanctions disciplinaires…), compte tenu de leurs moyens.

L’association qui ne respecte pas le CER peut être contrainte de restituer la partie de la subvention perçue postérieurement au manquement au CER ou peut se voir retirer son agrément. Quant à l’association agréée par l’Agence du service civique, le non-respect du CER l’oblige à rembourser les aides perçues à compter de la constatation du manquement en plus de lui faire perdre son agrément pour une durée de 5 ans.


Guide pratique, « Le contrat d’engagement républicain », gouvernement


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Nouvelle Politique agricole commune : qu’est-ce qu’un agriculteur actif ?

Pour bénéficier des aides de la PAC, les exploitants agricoles doivent désormais répondre à la définition de « l’agriculteur actif ». Les critères permettant de satisfaire à cette définition sont désormais connus.

Vous le savez : avec l’entrée en vigueur, en 2023, de la nouvelle Politique agricole commune (PAC), les exploitants agricoles doivent satisfaire à la définition de l’agriculteur actif pour pouvoir percevoir les aides de la PAC.

Sont concernées les aides du premier pilier (aide de base au revenu, aide redistributive, aide complémentaire JA…), les aides découplées, les aides couplées végétales et animales et certaines aides du second pilier comme les indemnités compensatrices de handicap naturel, les aides à l’agriculture biologique, les MAEC (mesures agro-environnementales et climatiques) et les aides à l’assurance récolte.

À ce titre, est un agriculteur actif une personne physique ou morale qui met en valeur une exploitation et qui exerce une activité agricole. Dans le cas d’un demandeur sous forme sociétaire, c’est la société qui est considérée comme agriculteur.

Les exploitants individuels

Plus précisément, s’agissant des exploitants individuels, est un agriculteur actif la personne physique qui exerce une activité agricole et qui est affiliée à l’ATEXA (assurance accidents du travail et maladies professionnelles des exploitants agricoles). Et si elle a plus de 67 ans, elle ne doit pas avoir fait valoir ses droits à la retraite, tous régimes de retraite confondus.


À noter : les cotisants solidaires sont considérés comme des agriculteurs actifs, quel que soit leur revenu, lorsqu’ils remplissent les conditions pour être affiliés à la MSA et qu’ils exploitent une superficie supérieure à deux cinquièmes de la surface minimale d’assujettissement (SMA) ou consacrent plus de 150 heures par an à l’activité agricole.

Les sociétés

Quant aux sociétés, qu’elles soient civiles à objet agricole, comme les Gaec, les EARL, les SCEA ou les GFA exploitants, ou commerciales (SARL, SAS, SA), elles remplissent la condition de l’agriculteur actif lorsque :– un associé au moins remplit les conditions énoncées ci-dessus pour les exploitants personnes physiques ;– ou, si aucun associé n’est exploitant, le ou les dirigeants de la société relèvent du régime de protection sociale des salariés agricoles, détiennent, directement ou indirectement, au moins 5 % du capital de la société et, s’ils ont plus de 67 ans, n’ont pas fait valoir leur droit à la retraite.


À noter : les sociétés coopératives de production sont considérées comme agriculteurs actifs si les associés salariés détiennent la majorité du capital social et relèvent du régime de protection sociale des salariés des professions agricoles.

Les autres personnes morales

Les personnes morales de droit public (lycées agricoles) exerçant une activité agricole ainsi que les associations, les fondations et les sociétés coopératives d’intérêt collectif dont les statuts prévoient l’exercice de l’activité agricole sont considérées comme étant agriculteurs actifs sans avoir à remplir d’autres conditions.


Décret n° 2023-366 du 13 mai 2023, JO du 14


Arrêté du 13 mai 2023, JO du 14


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Cession du bail commercial lors du départ en retraite et nouvelle activité

Lors de la cession du bail commercial par le locataire qui part à la retraite, le bailleur qui ne s’oppose pas au changement d’activité exercé dans le local loué est néanmoins en droit, au moment du renouvellement du bail, d’invoquer ce changement d’activité pour demander une augmentation du montant du loyer.

Lorsqu’un commerçant cède son bail commercial lors de son départ à la retraite, il se peut que le repreneur souhaite exercer dans les locaux loués une activité différente de celle prévue au bail. Dans ce cas, le locataire sortant doit informer le bailleur de ce changement d’activité. Ce dernier peut alors s’opposer au changement en saisissant le juge dans un délai de 2 mois. Il peut également exercer la faculté dont il dispose de racheter en priorité le bail dans ce même délai de 2 mois. Sachant qu’en l’absence de réaction de sa part, il est réputé avoir donné son accord au changement d’activité.

Dans ce cadre (cession du bail commercial lors du départ à la retraite du locataire), le bailleur ne peut pas, contrairement à un changement d’activité opéré par le locataire en cours de vie active, invoquer ce changement d’activité pour obtenir une augmentation immédiate du montant du loyer. En revanche, au moment du renouvellement du bail, il est en droit d’invoquer ce changement, intervenu au cours du bail expiré, pour demander une revalorisation du montant du loyer au-delà du plafond autorisé (on parle de « déplafonnement » du loyer).

C’est ce que les juges ont affirmé dans une affaire où l’exploitant d’un commerce de décoration avait, lors de son départ à la retraite, cédé son bail commercial à un commerçant qui souhaitait exercer dans le local une activité de joaillerie. Le bailleur ne s’était pas opposé à ce changement, mais, à l’expiration du bail, il avait envoyé au nouveau locataire un congé avec offre de renouvellement moyennant un loyer déplafonné justifié par le changement d’activité. Ce dernier avait alors considéré que le bailleur, qui n’avait pas réagi lors du changement d’activité, ne pouvait pas ensuite, à l’occasion du renouvellement du bail, invoquer ce changement pour solliciter le déplafonnement du montant du loyer.

Mais les juges n’ont pas donné raison au nouveau locataire. Pour eux, ce n’est pas parce que le bailleur ne s’était pas opposé au changement d’activité qu’il avait renoncé à se prévaloir de ce changement pour demander une augmentation du loyer au moment du renouvellement du bail.


Cassation civile 3e, 15 février 2023, n° 21-25849


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Cadeaux aux bénévoles associatifs

Afin de remercier nos bénévoles, qui se sont très fortement impliqués dans notre association depuis le début de l’année, nous souhaitons leur offrir un cadeau. Mais en avons-nous le droit ?

Votre question est très pertinente ! D’une part, car les bénévoles exercent leurs missions gratuitement et d’autre part, car une association ne peut procéder à aucune distribution directe ou indirecte de bénéfices, sous quelque forme que ce soit, à ses adhérents.

Toutefois, vous pouvez quand même leur offrir un cadeau car l’administration fiscale tolère qu’une association fasse des cadeaux de faible valeur à ses bénévoles à condition que leur prix soit inférieur au montant de la cotisation versée par le bénévole et que leur valeur totale ne dépasse pas 73 € TTC par année civile et par personne.


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Les retards de paiement des entreprises tombent sous les 12 jours

En 2022, les retards de paiement des entreprises ont poursuivi leur baisse pour s’établir à 11,7 jours.

Selon le rapport annuel de l’Observatoire des délais de paiement, remis le 14 juin dernier au gouvernement, les retards de paiement entre entreprises ont poursuivi leur baisse en 2022. Ainsi, malgré un contexte compliqué (tensions sur les approvisionnements, forte inflation, hausse drastique des coûts de l’énergie), ils sont passés en moyenne de 12,4 jours en 2021 à 11,7 jours en 2022. En outre, la proportion des « grands retards », ceux de plus de 30 jours, a retrouvé son niveau d’avant-crise sanitaire, à 6 %.

À noter que tous les secteurs d’activité bénéficient de cette évolution positive, hormis ceux de l’hôtellerie-restauration (particulièrement impacté par la crise sanitaire) et du transport-logistique, qui restent à des niveaux autour de 16 jours.


Précision : la France reste bien positionnée sous la moyenne européenne (13 jours), derrière les pays du Nord (Belgique, Allemagne, Pays-Bas) qui sont les plus vertueux en matière de retard de paiement.

Les PME bons payeurs

Si les PME demeurent les bons élèves de la classe puisque les trois quarts d’entre elles règlent leurs fournisseurs en moins de 60 jours, donc en deçà du délai légal, elles sont également les plus pénalisées par les retards de paiement, avec un effet négatif global sur leur trésorerie estimé à 12 milliards d’euros en 2021.

À l’inverse, les grandes entreprises qui paient leurs fournisseurs dans les délais ont été moins nombreuses en 2022, leur part ayant légèrement diminué pour passer sous la barre des 40 %.

Dans le secteur public, la situation va également dans le bons sens, tout au moins pour l’État qui a réduit ses délais de paiement en 2022. En revanche, les délais de paiement des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière ont augmenté d’1,3 jour pour s’établir à près de 29 jours (28,9 jours).

Les contrôles de la DGGCRF

Sur les 1 219 établissements, privés et publics, contrôlés en 2022 par la DGCCRF, des anomalies ont été relevées chez 33 % d’entre eux. Comme les années précédentes, des défaillances ont été constatées chez certaines entreprises en matière d’organisation comptable (circuits de validation des factures trop longs ou trop complexes, centres de services partagés situés à l’étranger) qui sont à l’origine de nombreux retards de paiement. Les grandes entreprises étant particulièrement concernées par ces dysfonctionnements…


À noter : la DGCCRF n’hésite pas à infliger des amendes aux mauvais payeurs (33,5 M€ en 2022) et à rendre public leur nom (« name and shame »).


Rapport 2022 de l’Observatoire des délais de paiement


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Demander la requalification d’un contrat de location en bail commercial : quand agir ?

Le délai de 2 ans pour agir en requalification d’un contrat de location en bail commercial soumis au statut court, lorsque ce contrat s’est renouvelé, à compter de la date de conclusion du dernier contrat, et non pas à compter de la date de conclusion du contrat initial.

Jusqu’alors, les juges considéraient que le délai de 2 ans pour demander en justice la requalification d’un contrat de location en bail soumis au statut des baux commerciaux courait à compter de la date de conclusion du contrat initial, même lorsque ce contrat s’était renouvelé.

Changement de donne ! Dans une affaire récente, la Cour de cassation a estimé que le point de départ de ce délai de 2 ans est la date de conclusion du contrat dont la requalification est demandée, et ce même lorsque plusieurs contrats distincts dérogeant au statut des baux commerciaux se sont succédé.

Dans cette affaire, une commune avait consenti à l’exploitant d’un commerce de piano-bar-restaurant, pour le logement de son personnel, sept conventions d’occupation précaire successive, la première ayant débuté le 15 novembre 2009 pour une durée de 6 mois et la dernière le 1er novembre 2014 pour une durée d’un an. Puis elle avait proposé au commerçant « un bail de location saisonnière » pour l’année 2016. Ce dernier avait refusé cette proposition et, le 26 mai 2016, avait agi en justice contre la commune pour que les juges reconnaissent qu’il était titulaire d’un bail commercial soumis au statut des baux commerciaux.

Le tribunal judiciaire, puis la cour d’appel, avaient considéré que son action était prescrite. En effet, pour eux, le point de départ du délai (2 ans donc) pour une telle action est la date de conclusion de la convention initiale (en l’occurrence le 15 novembre 2009), même si cette convention a été renouvelée ensuite.

Mais la Cour de cassation, devant laquelle le litige avait été porté, a affirmé, au contraire, que ce délai de 2 ans court à compter de la date de conclusion du contrat dont la requalification est demandée, donc à compter de celle du dernier contrat en date (en l’occurrence le 1er novembre 2014). L’action engagée le 26 mai 2016 n’était donc pas prescrite.


Cassation civile 3e, 25 mai 2023, n° 22-15946


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Association nationale : intérêt à contester une décision adoptée à un niveau local

Une association dont le champ d’intervention est national peut demander l’annulation de certaines décisions prises au niveau local.

Une association ne peut engager une action en justice que si elle a un intérêt à agir au regard de l’objet défini dans ses statuts, notamment quant à son périmètre géographique.

C’est pourquoi une association dont le ressort est national ne peut pas, en principe, demander l’annulation d’une décision administrative adoptée à un niveau local, par exemple, par un maire ou un préfet. Par exception, les tribunaux reconnaissent cette possibilité lorsque la décision soulève, en raison de ses implications, des questions qui, par leur nature et leur objet, excèdent les seules circonstances locales.

Ainsi, dans une affaire récente, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a autorisé l’association Sea Shepherd France à demander l’annulation d’un arrêté du préfet de La Réunion autorisant, à la suite d’attaques de requins sur l’homme, le prélèvement de requins-bouledogues et de requins-tigres dans des zones classées « zone de protection renforcée A2 de la réserve naturelle nationale marine de La Réunion ».

Pour en arriver à cette décision, les juges ont considéré que cet arrêté préfectoral était susceptible d’entraîner la destruction de spécimens d’espèces protégées dans une réserve naturelle nationale. En effet, les palangres verticales munies d’hameçons utilisées pour les prélèvements de requins entraînent également la prise « accessoire » d’espèces protégées ou classées vulnérables ou en danger (raies, requins-marteaux, tortues…). Ainsi, entre 2018 et 2021, ce procédé a conduit à la capture de 49 requins-bouledogues et 226 requins-tigres, mais aussi à 483 prises « accessoires ».


Cour administrative d’appel de Bordeaux, 31 janvier 2023, n° 21BX04291


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