Le motif mentionné dans le congé envoyé au locataire par un bailleur qui s’oppose au renouvellement du bail rural de ce dernier ne peut plus être modifié ensuite.
Le propriétaire qui refuse de renouveler le bail rural d’un exploitant agricole doit envoyer à ce dernier un congé mentionnant le motif de ce refus. Et attention, une fois le congé délivré, ce motif ne peut plus être modifié.
Ainsi, dans une récente affaire, un bailleur avait envoyé à son locataire un congé pour refus de renouvellement du bail au motif que ce dernier avait sous-loué une parcelle à une société sans son autorisation. Le locataire avait alors contesté ce congé en justice. Par la suite, ayant pris conscience que le motif tiré de la sous-location prohibée ne tenait pas la route (l’existence de la sous-location n’ayant pas été établie), le bailleur avait changé son fusil d’épaule en invoquant, au cours du procès, un nouveau motif, à savoir le fait que le locataire avait irrégulièrement sous-loué une maison dépendant d’une autre parcelle. Mais ce nouveau motif, distinct de celui invoqué dans le congé, a été inopérant aux yeux des juges qui ont donc annulé le congé.
Conclusion : le bailleur qui entend s’opposer au renouvellement d’un bail rural a intérêt à rédiger son congé avec le plus grand soin. Car il ne pourra plus le modifier ensuite. Et tant pis si le motif qui y est invoqué se révèle infondé alors qu’un autre motif aurait été plus pertinent.
Rappel : le bailleur ne peut s’opposer au renouvellement du bail que dans certains cas limités : exercice du droit de reprise, locataire exploitant ayant atteint l’âge de la retraite, faute grave commise par ce dernier (défaut de paiement du fermage, agissements de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds, cession de bail prohibée…).
Cassation civile 3e, 23 novembre 2017, n° 16-19555
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Lors de la dernière assemblée générale de notre société anonyme, nous avons adopté une résolution portant sur un sujet qui ne figurait pas à l’ordre du jour. Un associé pourrait-il la faire annuler ?
L’assemblée générale d’une société ne peut délibérer que sur les questions qui figurent à l’ordre du jour. Une décision prise en violation de cette règle serait susceptible d’être annulée. Cette sanction (la nullité) est en tout cas expressément prévue par les textes régissant la société anonyme.
Toutefois, ce principe supporte quelques exceptions. D’une part, l’assemblée peut toujours modifier, par voie d’amendements proposés en séance, les projets de résolution qui lui sont soumis, à condition de ne pas sortir de l’ordre du jour. D’autre part, elle peut adopter des résolutions supplémentaires qui sont la conséquence nécessaire des délibérations inscrites à l’ordre du jour. Enfin, elle peut, en toutes circonstances, révoquer un ou plusieurs membres du conseil d’administration ou de surveillance et procéder à leur remplacement.
Sans compter les questions diverses, mais qui doivent être de minime importance.
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Lorsqu’un commerçant a mis son fonds de commerce en location-gérance alors qu’il ne satisfaisait pas à la condition de l’avoir exploité pendant au moins 2 ans, ce contrat est nul. Le propriétaire du local est alors en droit de refuser le renouvellement du bail.
Pour pouvoir donner son fonds de commerce en location-gérance, son propriétaire est, sauf exceptions (fonds de commerce de cinémas ou de théâtres, héritiers d’un commerçant décédé…), tenu de l’avoir exploité lui-même pendant au moins 2 ans.
Précision : toutefois, lorsqu’il justifie de son impossibilité d’exploiter le fonds personnellement (ou par l’intermédiaire de préposés), le commerçant peut demander au président du tribunal de grande instance d’être dispensé du respect de cette obligation. Tel peut être le cas notamment lorsque l’état de santé de l’intéressé l’empêche de poursuivre l’exploitation du fonds de commerce.
Et attention, lorsqu’un contrat de location-gérance est consenti bien que le commerçant n’ait pas exploité le fonds pendant au moins 2 ans, ce contrat est nul. Du coup, le propriétaire du local dans lequel le fonds de commerce est exploité est en droit de refuser le renouvellement du bail commercial pour ce motif sans indemnité d’éviction. C’est ce que les juges ont rappelé dans une affaire récente.
Cassation civile 3e, 22 mars 2018, n° 17-15830
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Établir un registre des traitements de données personnelles est désormais obligatoire. Pour faciliter la mise en conformité des entreprises, la Cnil propose des modèles de registres commentés.
À compter du 25 mai 2018, le règlement général sur la protection des données (RGPD) entre en vigueur. Toutes les entreprises qui sont amenées à administrer des fichiers de données personnelles, c’est-à-dire permettant directement ou indirectement d’identifier une personne, sont désormais tenues de l’appliquer. Parmi les nouvelles obligations se trouvent la création et la tenue d’un registre. Ce dernier pouvant être un document papier ou numérique. Centralisé et régulièrement mis à jour, il vise à recenser tous les traitements de données personnelles mis en œuvre par l’entreprise, directement ou par l’intermédiaire d’un prestataire. Concrètement, pour chaque traitement, doivent être renseignés sa finalité, le type de données personnelles présentes (nom, salaire, adresse…), les personnes ou les services qui peuvent y accéder, la durée de conservation de ces données et enfin comment elles sont sécurisées.
Des modèles simples et commentés
Pour faciliter le travail de mise en conformité des entreprises et notamment des petites structures, la Cnil propose en libre téléchargement des modèles de registre. En format traitement de texte ou Pdf, ils présentent l’architecture du registre à mettre en place et détaillent chaque type d’information qu’il doit contenir. Pour chacun des champs à remplir, sont proposés des exemples facilitant ainsi l’identification du type de données attendues.
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Lorsque le mot « principal » ne figure pas dans la mention manuscrite écrite par la personne qui s’est portée caution pour une société envers une banque, cette personne n’est tenue de rembourser que les accessoires de la dette.
Lorsqu’un dirigeant se porte caution pour sa société envers un créancier professionnel, en particulier à l’égard d’une banque en contrepartie de l’octroi d’un crédit, et que ce contrat est établi par acte sous seing privé (c’est-à-dire sans l’intervention d’un notaire), il doit faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante prévue par la loi : « En me portant caution de [la société] X dans la limite de la somme de … € couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de …, je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si [la société] X n’y satisfait pas lui [elle]-même. »
Et attention, si cette mention n’est pas reproduite à l’identique, le cautionnement est susceptible d’être annulé par les juges. Tel est le cas lorsque l’inexactitude de la mention manuscrite a porté atteinte au sens et à la portée de celle-ci.
Un cautionnement limité dans son étendue
Mais parfois, l’omission de certaines mentions dans la mention manuscrite ne rend pas le cautionnement nul, mais en limite simplement l’étendue. Illustration avec une affaire récente.
Une personne s’était portée caution envers une banque de divers engagements pris par sa société. Lorsque la société avait été mise en liquidation judiciaire, la banque avait appelé cette personne en paiement. Celle-ci avait alors fait valoir que son engagement de caution était nul car la mention manuscrite inscrite dans l’acte ne comportait pas le mot « principal ». Malheureusement pour l’intéressé, les juges ont estimé que cette omission n’était pas de nature à affecter la validité du cautionnement. Mais qu’en revanche, elle avait eu pour conséquence de limiter l’étendue du cautionnement aux accessoires de la dette, c’est-à-dire aux intérêts et aux pénalités de retard seulement. Ce qui limitait considérablement la somme à payer !
À noter : cette décision est conforme à celles précédemment rendues par la Cour de cassation. Ainsi, dans une affaire où le mot « intérêts » ne figurait pas dans la mention manuscrite, les juges ont considéré que le cautionnement ne couvrait que le principal de la dette. De même, dans un cas où les termes « mes biens » avaient été oubliés, ils ont estimé que la caution n’était engagée que sur ses revenus.
Cassation commerciale, 14 mars 2018, n° 14-17931
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Je compte investir dans un appartement pour faire de la location meublée. Une de mes connaissances m’a indiqué que je devais disposer d’un numéro SIRET pour pratiquer cette activité. Pouvez-vous me confirmer cette information ?
Cette information est correcte. L’activité de location meublée nécessite une inscription auprès d’un centre de formalités des entreprises. Un centre qui vous fournira ce fameux numéro SIRET. Concrètement, vous obtiendrez ce numéro lors de votre inscription auprès de la chambre de commerce et d’industrie si vous êtes professionnel ou auprès du greffe du tribunal de commerce dont dépend le logement que vous mettez en location si vous êtes un loueur non professionnel.
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Lorsqu’un Gaec demande l’autorisation d’exploiter des terres supplémentaires en raison de l’installation en son sein d’un nouvel associé, cette demande bénéficie du rang de priorité accordé aux installations par le schéma directeur des structures.
Lorsque plusieurs exploitants agricoles formulent chacun, de façon concurrente, une demande d’autorisation administrative d’exploiter portant sur les mêmes parcelles de terre, le préfet doit prendre sa décision en fonction des orientations définies par le schéma directeur régional des structures agricoles (SDRSA). Autrement dit, il doit délivrer l’autorisation d’exploiter à celui des exploitants dont le projet est classé plus prioritaire que celui de l’autre au regard des priorités établies par ce schéma.
Lorsqu’une demande d’autorisation émane d’une société, les conditions de cette demande sont évidemment appréciées au regard de la situation de cette société, et non de celle de ses associés, puisque les terres considérées sont destinées à être exploitées par celle-ci. Mais il n’en est pas de même s’agissant d’un Gaec, ainsi qu’en atteste une récente décision de justice.
Dans cette affaire, un Gaec avait déposé une demande d’autorisation d’exploiter de nouvelles terres en raison de l’installation d’un jeune agriculteur qui venait d’y adhérer. Parallèlement, un agriculteur voisin avait également demandé l’autorisation d’exploiter ces mêmes terres. Saisis du litige qui s’en est suivi, les juges ont estimé que la demande, bien qu’émanant du Gaec, devait se voir reconnaître prioritaire au titre de l’installation d’un jeune agriculteur. C’est donc bien le Gaec qui s’est vu accorder l’autorisation d’exploiter.
Commentaire : ici, les juges, même sans le dire expressément, ont sans nul doute fait application du fameux principe de transparence des Gaec, qui les ont conduits à prendre en considération la situation personnelle de l’associé à l’origine de la demande d’autorisation d’exploiter plutôt que celle du Gaec pourtant appelé à exploiter les terres objet de la demande. Grâce à ce principe, le jeune associé du groupement a donc pu bénéficier de la priorité accordée aux installés.
Conseil d’État, 22 février 2018, n° 402159
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À compter du 1 janvier 2019, la lettre recommandée électronique contractuelle utilisable depuis 2011 sera remplacée par la lettre recommandée électronique eIDAS.
Le principe de l’équivalence d’un envoi par lettre recommandée électronique (LRE) à un envoi par lettre recommandée papier est prévu par le droit français depuis plusieurs années. Et encore aujourd’hui, deux types de LRE sont utilisables : l’envoi recommandé contractuel et la LRE e-IDAS. Mais à partir du 1er janvier prochain, seul ce dernier système, plus sécurisé et conforme à la réglementation européenne, sera reconnu par la loi. Explications.
Rapide et économique
Comparé à une lettre recommandée papier, la LRE ne manque pas de charme : elle peut être envoyée à partir d’une simple adresse mail vers une autre (plus besoin de se rendre dans un bureau de poste) et à toute heure du jour ou de la nuit ; elle permet de toucher un destinataire en quelques minutes ; et enfin, elle coûte généralement 30 à 40 % moins cher qu’une lettre recommandée papier de moins de 20 g et ce, même si elle comprend plusieurs centaines de pages. D’un point de vue juridique, le principe de son équivalence à une lettre recommandée papier a été acté par une loi de 2005. Et il a fallu attendre 2011 pour qu’un décret vienne définir ses modalités de mise en œuvre : l’envoi recommandé contractuel était né. Une LRE qui, comme son nom l’indique, ne peut être envoyée que dans le cadre d’une relation contractuelle et qui, dès lors, ne requiert pas une vérification d’identité lors de sa remise au destinataire.
La LRE eIDAS
Définie par le règlement européen eIDAS de 2016, la LRE eIDAS est plus sécurisée notamment parce qu’elle impose au prestataire de vérifier l’identité de l’expéditeur au moment de l’envoi, mais aussi celle du destinataire lors de la réception (via une signature ou un cachet électronique). En outre, le prestataire est tenu de conserver pendant un an les informations relatives à l’envoi (données identifiant l’expéditeur et le destinataire, numéro de l’envoi, la date et l’heure de dépôt de l’envoi…) et à la réception de la LRE (preuve du refus, de non réclamation ou de réception). Comme l’envoi recommandé contractuel, si elle peut être directement adressée à un professionnel, la LRE eIDAS ne peut être envoyée à un non professionnel qu’après avoir recueilli son accord.
À savoir :le destinataire est informé par courriel par le prestataire qu’une lettre recommandée lui est destinée. Il n’est, en revanche, pas informé de l’identité de l’expéditeur. Il dispose de 15 jours pour l’accepter ou la refuser.
La LRE eIDAS, conformément au décret du 9 mai 2018 qui vient de préciser les conditions garantissant l’équivalence entre une lettre recommandée papier et une lettre recommandée électronique, sera la seule LRE reconnue par la loi à compter du 1er janvier 2019, faisant ainsi disparaître du cadre légal l’envoi recommandé contractuel. À compter de cette date, il conviendra donc de ne s’adresser qu’à des prestataires proposant des LRE conformes eIDAS.
Décret n° 2018-347 du 9 mai 2018, JO du 12
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Lorsqu’il est indispensable à l’exploitation du fonds de commerce auquel il est associé, le local d’habitation est soumis aux mêmes règles qu’un local commercial.
Lorsqu’un commerçant loue à un propriétaire un local commercial ainsi qu’un logement lui permettant d’exploiter ce fonds, la question peut se poser de savoir à quel statut le logement est soumis : bail d’habitation ou bail commercial ? La question a son importance car la protection conférée par chaque régime n’est pas identique. Le statut des baux commerciaux étant particulièrement protecteur car il permet à l’exploitant de bénéficier d’une stabilité indispensable à la bonne marche de son affaire (durée du bail de 9 ans au minimum, droit au renouvellement du bail et au paiement d’une indemnité d’éviction en cas de refus de renouvellement).
Alors, quel statut a-t-il vocation à s’appliquer ? Au cas par cas, les juges vont déterminer si le logement est indispensable à l’exploitation du fonds de commerce concerné. Si c’est bien le cas, ils lui appliqueront le statut des baux commerciaux. Et ce, même si bailleur et locataire s’étaient entendus pour signer un bail d’habitation pour la location de ce local.
Ainsi, dans une affaire récente, un bailleur avait donné en location à une société un local à usage de café-restaurant, soumis au statut des baux commerciaux, ainsi qu’un appartement destiné au personnel de la société, un local à skis et des réserves situés en sous-sol. Pour l’appartement, le bailleur et la société avaient conclu un bail d’habitation.Le conflit est survenu lorsque le bailleur a délivré au locataire un congé pour vendre l’appartement en application des dispositions régissant les baux d’habitation. En effet, la société locataire a contesté la validité du congé et demandé que le contrat soit requalifié en bail commercial. Avec succès ! Car les juges ont relevé que « compte tenu de la situation des lieux en sous-sol, imbriqués en partie, dès la conclusion du bail, « par emprise du local commercial », de l’absence de fenêtre et de la présence d’un compteur électrique commun au local commercial […], le local litigieux ne pouvait qu’être réservé au logement du personnel et au rangement des skis de la catèle ». Ils en ont déduit qu’il était indispensable à l’exploitation du fonds de commerce et devait donc être soumis au statut des baux commerciaux.
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Lorsque des associés se retirent d’une société civile professionnelle, la trésorerie de la société a vocation à être partagée entre eux et la SCP.
Lorsqu’un associé d’une société civile professionnelle (SCP) quitte la société en exerçant son droit de retrait, un règlement des comptes va s’opérer entre elle et lui. D’abord, il a droit au remboursement de la valeur de ses parts sociales. À ce titre, il peut exiger de la société qu’elle lui rachète ses parts, soit par d’autres associés ou par des personnes extérieures, soit par la société elle-même.
Rappel : un associé a le droit de se retirer d’une SCP dans les conditions prévues par les statuts, ce retrait ne devant toutefois pas être abusif.
Ensuite, l’associé qui se retire peut prétendre à l’ensemble des droits patrimoniaux qu’il détient dans la société et notamment à sa quote-part de la valeur du droit de présentation de la catèle évaluée au jour du retrait.
Enfin, il a également droit à une partie de la trésorerie. C’est ce que la Cour de cassation a décidé dans une affaire où 3 associés sur 4 d’une SCP d’infirmiers s’étaient retirés de la société. Cette dernière avait alors procédé au rachat de leurs parts sociales. La répartition entre eux des bénéfices et des charges du dernier exercice avait également été opérée. Mais un désaccord avait persisté sur le paiement de diverses sommes, les associés ayant notamment réclamé une partie de la trésorerie. Ils ont obtenu gain de cause en justice, les juges ayant estimé que la trésorerie de la société avait vocation à être partagée entre les associés retrayants et la SCP.
Cassation civile 1re, 20 décembre 2017, n° 16-17990
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